On l'aime, on l'attend, on le vit à
fond : il s'agit là, pour nous pasteurs et membres engagés de
nos communautés paroissiales, de notre fameux et ancestral culte du
dimanche, temps et lieu de ressourcement, de retrouvailles
communautaires, de mémoire et de
mise en œuvres de nos principes les plus chers, endroit
confortable où les membres de la communauté trouvent tout ce dont
ils ont besoin. Ce dimanche, à 10h30, loin de nos communautés et
de leurs bâtiments, qui nous ont, bien sûr, un peu manquées, nous
avons eu la chance de participer au culte de Holy Trinity Church, une
importante paroisse anglicane d'expression évangélique située au cente de Leicester. Notre
découverte a débuté avec un culte dominical qui m'a interrogée
sur la manière de « rafraîchir » cette manière
ancestrale de vivre l'Eglise qu'est notre cher et bon vieux culte.
Un espace pour le vide.
L'assistance au culte est jeune et
pourtant, de nombreuses chaises sont vides. Interrogée par cette
étrangeté, j'ai appris que le culte n'est pas compris comme le lieu
de rassemblement de toute la communauté paroissiale, mais bien
plutôt comme un lieu d'évangélisation. Ainsi, ceux qui sont à
l'Eglise depuis longtemps sont invités à se retrouver régulièrement
ensemble ailleurs, afin de laisser de la place aux « nouveaux »
ou aux « débutants ». De la même manière, ceux qui ne
se sont pas rassemblés en groupes sont invités à sortir pour une
marche priante dans la ville pendant le culte. Alors que nous avons
l'habitude de penser le culte en terme de remplissage et
d'édification communautaire, j'ai été frappée par cette manière
de faire de la place à ceux qui ne sont pas encore présents, nous
mettant au passage devant une manière de manière constructive le "non plein" de nos assemblées.
Un espace pour le quotidien.
La personne qui anime le culte souhaite
la bienvenue à deux reprises à tous les présents et en
particuliers aux nouveaux. Un accueil adapté est réservé aux
enfants, accueillis dans des groupes représentés par des logos qui
ressemblent à ceux que nous trouvons dans les publicités. Les
sièges, confortables, ont tout ce ce qu'on trouve dans divers lieux
de travail ou de détente, alors que la vieille église est aménagée
de manière pratique et moderne. Au programme du temps de louange, ni
Psaumes ni chants de victoire, mais des chants nouveaux, aisés à
suivre sur un écran. Tout est organisé pour que l'humain du XXIème
siècle se sente en confiance dans un univers qui ne diffère pas
radicalement de ce qu'il rencontre habituellement. Nous pensons
souvent les formes du culte en termes de tradition ou de principes
théologiques. Elles semblent ici pensées en fonction de l'appel que
Dieu adresse et qu'il s'agit de faire résonner dans un cadre assez
habituel pour que la démarche de confiance qu'implique la foi soit
facilitée.
Un espace pour la transformation.
L'église débute une série de
prédications sur la vocation. Nous entendons un sermon accessible et
intéressant sur le lien entre l'amour inconditionnel de Dieu et
notre appel personnel. Le message se terminé par un résumé projeté
sur l'écran de ce qu'il est possible de faire concrètement pour
progresser dans la mise en œuvre de notre appel au quotidien. Il
s'en suivi un « appel » classique à la conversion ainsi
qu'un temps de prière personnelle avec la possibilité de recevoir
la prière d'un membre de l'église. L'objectif affiché de ce temps
est que chacun puisse se laisser transformer par Dieu dans la
dynamique mise en avant par le message. Ainsi, alors que le cadre
proposé n'est qu'en peu différent de leur cadre quotidien, les
personnes sont appelées à changer, à grandir dans le sens tracé
par l'enseignement biblique, avec l'aide de Dieu, présent et
agissant. La foi n'est ici ni poésie ni montage intellectuel, mais
confiance appelée à changer la vie de ceux qui s'y engagent, ce
qui interroge l'aspect dynamique et transformant du message que nous
partageons en Eglise.
Une dynamique de changement.
Après le culte, nous sommes
reçus par John McGingley, le pasteur qui est à l'origine de la réorganisation novatrice de l'Eglise dont nous venons d'observer
le principal rassemblement dominical. Ainsi a-t-il été décidé,
il y a une dizaine d'années, que les groupes de maisons existants qui
visaient le confort de ceux qui s'y rendaient pour recevoir quelques
bienfaits spirituels seraient dissous pour être remplacés par des
communautés missionnaires. Ces communautés d'une dizaine de
personnes ont été chargées de discerner dans la prière leur appel
spécifique et d'y répondre en menant des actions pour les autres et
en se retrouvant pour des temps de prière et de partage biblique. De
cette dynamique ont émergé diverses initiatives tournées vers des
publiques spécifiques. Ainsi a-t-il été question d'un groupe
tourné vers les parents de jeunes enfants ou d'un groupe de personnes intéressées par l'écologie. Les
communautés missionnaires sont scindés pour donner naissance à de
nouveaux groupes, lorsque le nombre de personnes rassemblées est
trop important pour permettre la croissance du groupe comme des
individus.
A la racine de cette
méthode admirable par la dynamique d'innovation, de partage et
d'adaptation qu'elle met en œuvre se trouve beaucoup de confiance.
Ainsi, je pense n'avoir pas été la seule à frémir à l'idée que
l'institution dont nous nous percevons parfois comme les gardiens
puisse donner à des groupes de personnes une si grande liberté d'innovation. A l'origine de cette liberté dans les formes, se
trouve peut-être une certaine unité quant aux grandes lignes des
convictions partagées par les membres de l'église. Ainsi, bien que
John McGingley nous ait assuré que tous les groupes ne partageaient
pas la même théologie, le culte et les documents qui nous ont été
transmis témoignent d'un socle de convictions communes autour des
notions de la conversion, de sanctification et d’œuvre du
Saint-Esprit. Ainsi se dessine probablement le cadre et le moteur
d'une aventure originale : celle d'oser diversement ensemble.
Aurélie Derupt
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